Cartes pour la conservation des nicheurs prairiaux

Les nicheurs prairiaux sont des oiseaux adaptés à la vie dans les prairies et pâturages. Leur plumage cryptique leur garantit camouflage et sécurité lorsqu’ils couvent au sol. Le pipit farlouse et le tarier des prés en sont des représentants.

Sur le Plateau, ces espèces ont déjà été évincées ou deviennent de plus en plus rares, en raison de l’intensification des pratiques agricoles. Leurs derniers refuges sont les prairies et pâturages d’altitude, qui font cependant face à une pression croissante, qu’elle vienne de l’agriculture, de projets d’infrastructures, ou de l’embroussaillement des zones difficiles d’accès.

Pour préserver ces milieux précieux, il est essentiel de posséder des informations détaillées sur la distribution des espèces qui en dépendent. À cette fin, des cartes ont été créées pour le tarier des prés, l’alouette des champs, l’alouette lulu, le pipit des arbres, et le pipit farlouse. Ces espèces sont classées sur la liste rouge comme potentiellement menacées ou vulnérables, et la plupart sont prioritaires au niveau national. Elles se distinguent entre elles par leurs exigences en matière d’habitat, par exemple un paysage ouvert ou semi- ouvert, d’arbres et d’arbustes, et de perchoirs. Mais une fauche tardive (à partir du 1er ou du 15 juillet selon l’altitude) sur de grandes surfaces et une faible pression de pâture durant la période de reproduction sont bénéfiques pour toutes les espèces.

Pour la planification de mesures de conservation et de contrôles d’efficacité, ainsi que l’appréciation de conflits d’intérêts, il est utile de connaître la présence avérée et potentielle des espèces cibles. Les variables environnementales de haute résolution ont été combinées aux observations isolées et à celles issues des relevés systématiques pendant les saisons de nidification 2013- 2024, afin d’en obtenir des cartes.

Dans un premier temps, l’habitat potentiel a été identifié dans les régions de montagne et d’estivage pour chacune des cinq espèces. Pour ce faire, on a pris en compte les variables environnementales qui reflètent les exigences écologiques de chaque espèce, les données de présence-absence provenant de relevés systématiques tels que le Monitoring des oiseaux nicheurs répandus, les références bibliographiques, ainsi que l’expertise de spécialistes. Dans un deuxième temps, les surfaces potentiellement favorables ont été classées dans une des catégories suivantes : « présence avérée », « présence probable », « présence peu probable » et « absence avérée ». Une couverture étendue du territoire national n’a été possible que grâce aux observations de bénévoles (notamment les listes d’observations complètes) entre 2013 et 2024, et aux recherches ciblées d’oiseaux des prairies de 2024.

Les cinq cartes de distribution ont été superposées pour créer une carte combinée résumant l’habitat potentiel et la probabilité de présence des cinq espèces évaluées.

Les cartes produites peuvent aider les acteurs de la protection de la nature et du paysage à planifier des mesures de conservation ainsi que leurs contrôles d’efficacité, dans le cadre de plans d’action, de projets locaux de conservation des espèces, ou encore de projets de biodiversité régionale et de qualité du paysage. Elles trouvent également une application dans le cadre de l’aménagement du territoire : plans directeurs, plans d’affectation des zones, améliorations foncières, ou infrastructure écologique. Ces cartes permettent une évaluation rapide et efficace de la présence d’oiseaux des prairies en période de nidification, et identifient les surfaces potentiellement favorables à l’échelle nationale. La cartographie de territoires demeure nécessaire pour évaluer la taille des populations (effectifs nicheurs). Nous présentons ci-après un exemple concret d’application.

Les projets d’infrastructure doivent subir une évaluation de leur impact environnemental, tant pendant leur phase de réalisation (à court terme) que lors de leur phase d’exploitation (à long terme), conformément aux lois sur la chasse et sur la préservation de la nature et du paysage. En cas d’impacts avérés lors de la phase de réalisation, des conditions peuvent être imposées pour que les travaux de construction soient effectués en dehors de la période de nidification. Les impacts en phase d’exploitation concernent les projets qui peuvent influencer des habitats sur une grande surface, comme les routes de desserte ou les améliorations foncières. La carte combinée facilite l’évaluation de tels projets par les services spécialisés, car il n’est pas nécessaire de rechercher la présence des espèces dans les zones « ≥ 1 espèce avérée ». Dans les zones « ≥ 1 espèce probable », des relevés de terrain devraient être réalisés. L’utilisation des cartes peut augmenter l’efficacité des procédures d’autorisation en réduisant le temps nécessaire à une enquête approfondie sur la présence des oiseaux des prairies. De plus, une meilleure protection des zones sensibles est favorisée. Ainsi, les cartes contribuent à préserver les prairies et pâturages précieux, où les nicheurs prairiaux trouvent encore refuge.